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Humeurs, reflexions et aventures qui m'ont permis d'atteindre au statut de capibara détendu

Le récit d'une addiction

Publié le 13 Novembre 2013 par Capi

Le récit d'une addiction

Au début, j’ai commencé à jouer pour voir, parce que je voyais tous ces gens dans le métro avec leurs ecrans colorés. Jeunes, vieux, tout le monde s’y mettait. Jusque là, je voyais plutôt des gens occupés à envoyer des SMS, à répondre à des emails urgents, voire plus rarement à lire. Et là, c’était l’hécatombe.

J’ai un peu regardé les forums et j’ai réussi à identifier l’objet passionnel : candy crush, ou j’écrase des bonbons. Plus tard, je me souviens que j’ai pensé qu’il s’agissait plutôt d’un crush, un coup de cœur pour ces satanés bonbons.

Le concept paraît complètement débile, soyons clairs. Une faible dose de gymnastique intellectuelle (aligner 3 bonbons identiques sur une ligne ou une colonne) sachant qu’il y a 4 types de bonbons classiques. Le visuel est simple, très coloré. On arrive facilement à l’écoeurement. Mais comme toute bonne addiction, plus c’est mauvais, plus c’est bon.

J’en ai parlé à une amie qui m’a dit qu’elle s’y était mise aussi. Et on a décidé que ne nous ne céderions pas à l’attrait d’acheter des vies et autres gimmicks. Non. Nous irions loin par nous-mêmes. Autonomes. Grandes. Enfin, si je puis dire.

Donc j’ai commencé à jouer dans le métro. De temps en temps. Au bout de quelques jours, je ne prenais plus ma voiture pour mes déplacements habituels. Non. Pourquoi ne pas y aller en métro ? 4 changements ? Peu importe. Le métro c’est écolo. Et puis j’ai joué à la maison, j’ai délaissé mes révisions, mon blog même, pour jouer des heures entières. J’ai notamment passé 3 heures dans le train où je ne me suis arretée que pour aller aux toilettes. Le tout sous les yeux médusés de mes deux enfants. ‘Maman, tu fais quoi ? Je peux jouer ?’. ‘Arghhhhh ! Malheureux ! tu as déplacé le rouge et le orange, alors qu’en déplaçant les jaune et le vert, je faisais une super combinaison ! J’aurais pu obtenir le booster multicolore méga-top qui écrase tout sur son passage ! Arrête ! Ne touche plus !’. J’ai frôlé la crise de nerf.

Mon mari qui est totalement hermétique à ce type de jeu m’a regardée avec un certain dédain. Et la honte s’est installée.

Car oui, j’ai conservé un certain recul par rapport à moi-même et à la place qu’un jeu devrait garder dans ma vie. Mais un recul limité. A partir de ce moment-là, j’ai commencé à jouer cachée.

Dans les toilettes ou la salle de bains: chérie, ça va ? Tu es malade ? qu’est ce que tu fais ? On va être en retard !. Oui, oui, j’arrive, je me repoudre le nez ! Mais d’habitude tu ne te maquilles pas … ? Oui, ben j’ai changé, il est temps que je commence à prendre soin de moi. J’ai 40 ans merde. Tu n’es pas en train de jouer à ce jeu idiot ? Pfff. Comment peux-tu imaginer une chose pareille ! Ne sois pas ridicule.

A noter que dans tous ces moments où je me suis enfermée avec mon portable jamais mon mari n’a imaginé que je puisse être en train d’envoyer des SMS adultérins avec un bel inconnu, c’est dire la confiance aveugle qu’il me porte.

J’ai joué quand lui était aux toilettes ou dans son bureau. Et dès que je l’entendais arriver, je cachais mon téléphone sous un coussin du canapé. Maman, pourquoi tu mets ton téléphone là ? Gabriel, tais-toi.

Je savais que tout cela allait trop loin mais comment faire ?

Je suis arrivée au niveau 30 avec la pause obligatoire de 24 heures entre les épreuves. (Dois-je vraiment expliquer ? Je suis convaincu que tout lecteur saura exactement de quoi je parle étant lui (elle)- même arrivé€ au niveau 126 depuis longtemps) J’ai respiré. Je me suis dit : ah, c’est bien, je vais pouvoir reprendre le cours de ma vie. Non, vraiment, quelle bonne chose.

J’ai tenu 2 heures. Et j’ai installé le jeu sur mon iPad. En parallèle de mon iPhone. J’étais assurée de pouvoir jouer en continu.

Ca m’a rappelé Zelda, jeu qui m’avait occupée sur ma GameBoy Advanced à l’époque environ 3 heures par jour alors que je travaillais. A l’époque, c’est dans les toilettes du bureau que j’allais me cacher pour jouer. Ou encore je jouais la GameBoy cachée sous mon desk, persuadée que personne ne voyait ce que je faisais. J’avais fini le jeu au prix d’efforts surhumains, de recherches de solutions sur internet, et de 3 mois d’exercice quotidien. J’ai donné la GameBoy à mon neveu, jurant qu’on ne m’y reprendrait plus.

Mensonge évidemment. J’ai remis ça l’été dernier avec Accross Ages, jeu similaire à Zelda sur iPad qui m’a occupée 2 bons mois, puis cet automne avec Candy Crush.

Tu noteras cher lecteur que je parle au passé. Oui. J’ai été forte. Un jour de Novembre, alors que j'étais restée bloquée sur le niveau 47 pendant une semaine et que je m'étais réveillé le matin même en nage après des rêves de bonbons multicolores, j’ai réalisé que l'heure était grave. Je me suis dit que ça devait cesser et j’ai deleté avec fierté Candy Crush sur mon iPhone. J’ai appelée ma candy crush friend et lui ai annoncé la bonne nouvelle. Elle m’a félicitée comme on félicite un ancien alcoolique qui entame sa deuxième semaine de sevrage.

J’ai conservé la version iPad. Sorte de solution mitigée. Je n’emporte pas mon iPad dans le métro ni aux toilettes, et c’est plus difficile à cacher sous les coussins du canapé (encore que). Le sevrage suit son cours. Bientôt la fin. Jusqu’au prochain jeu.

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